Les médicaments pédiatriques, un besoin qui perdure

Publié le 18 février 2019 Lecture 25 min

En décembre 2006, le Parlement européen publiait un texte de loi relatif aux médicaments à usage pédiatrique visant à stimuler le développement des formes médicamenteuses destinées aux enfants, par les industriels pharmaceutiques. Si l’agence européenne des médicaments (EMA) a constaté une augmentation significative du nombre de nouveaux médicaments pédiatriques, le besoin est toujours réel. En effet on constate encore aujourd’hui que plus de 50% des prescriptions pédiatriques sont faites hors AMM. Alcimed, société de conseil en innovation et développement de nouveaux marchés, s’est penchée sur les raisons qui limitent encore le développement de médicaments pédiatriques, 10 ans après la parution du texte.

La pédiatrie, une spécialité médicale délaissée

Si pour les symptômes les plus courants, tels que de la fièvre, la toux ou encore les douleurs dentaires, il existe des médicaments adaptés aux enfants, pour des pathologies plus graves en revanche, l’arsenal médicamenteux vient vite à manquer. Pour pallier le manque de formes pédiatriques adaptées, les médecins doivent se contenter d’administrer des médicaments pour adultes, en adaptant la posologie à l’âge, au poids ou encore à l’intensité des symptômes. Par la suite les équipes de soignants doivent se résoudre à écraser, couper et diluer des médicaments pensés pour les adultes, se heurtant ainsi aux risques de sous-dosage et d’inefficacité, ou plus grave, aux effets secondaires liés à une utilisation hors AMM.

Une réglementation européenne incitative

Face à cette situation, l’Europe a décidé à partir de l’année 2007 d’imposer aux acteurs pharmaceutiques développant un médicament destiné aux adultes l’obligation de déposer auprès du Comité des médicaments pédiatriques européen (PDCO), un plan d’investigation pédiatrique (PIP). Cette mesure vise à ce que les développements pédiatriques soient inclus dans le plan de développement global de tout nouveau principe actif. Les potentielles dérogations dans le cas où le produit n’aurait pas d’intérêt chez l’enfant sont à justifier par les industriels. En contrepartie de cet investissement, l’industriel bénéficie de mesures de protection accrues selon le statut du produit évalué en pédiatrie :
– Extension de brevet de 6 mois pour les nouveaux produits,
– Statut d’exclusivité pour l’indication pédiatrique développée pour les médicaments déjà autorisés et tombés dans le domaine public,
– Ajout de 2 ans d’exclusivité de marché pour les médicaments orphelins.

Mais des résultats encore timides

Plus de 10 ans après la parution de la réglementation européenne, l’intérêt pour les médicaments pédiatriques se ravive peu à peu. Les dépôts de PIP augmentent et de nouveaux médicaments voient le jour : depuis 2008, plus de 18 000 études pédiatriques – portant sur environ 2 200 médicaments – ont été soumises aux autorités européennes compétentes ; la proportion d’essais cliniques incluant des enfants a augmenté de 50 % entre 2007 et 2016, et sur les 152 nouveaux médicaments mis sur le marché depuis l’entrée en vigueur du règlement, 31 ont été autorisés pour un usage pédiatrique et de nombreuses autres autorisations en pédiatrie sont attendues dans les prochaines années  [1].

Pourtant plusieurs freins persistent. Les essais cliniques pédiatriques effrayent toujours les parents, rendant souvent difficile de recruter le nombre d’enfants nécessaire pour être statistiquement significatif. De plus, pour des raisons de sécurité ou éthiques, les phases cliniques chez les enfants restent plus longues à mettre en place, entraînant des délais dans la commercialisation des formes pédiatriques. Enfin, le développement de formulations adaptées aux contraintes pédiatriques et la conduite des essais cliniques dédiés demande un investissement considérable aux industriels, avec une rentabilité qui reste non assurée si la maladie est peu fréquente. Reste à voir si avec le temps, la démocratisation des essais cliniques pédiatriques permettra de faire évoluer les pratiques et de lever certaines de ces barrières.

« Si l’entrée en vigueur du règlement relatif aux médicaments à usage pédiatrique a permis plusieurs améliorations notables – une recherche de meilleure qualité, une offre de médicaments pédiatriques élargie en UE – il faudra néanmoins attendre encore plusieurs années pour percevoir tous les effets de la législation, en raison de la longueur du cycle de conception des médicaments. » conclut Marie Rolin, Responsable de Mission dans la BU Santé d’Alcimed à Paris.

[1] https://solidarites-sante.gouv.fr

 

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