Santé Agroalimentaire Cross-sectoriel

APLV : quel produit développer pour les bébés souffrant d’allergie aux protéines de lait de vache ?

Publié le 06 mai 2021 Lecture 25 min

L’allergie aux protéines de lait de vache, ou APLV, est une maladie affectant le système immunitaire d’un bébé, ce dernier réagissant aux protéines contenues dans le lait de vache. Cette allergie se manifeste généralement chez les nourrissons avant l’âge d’un an et, dans la plupart des cas, disparaîtra progressivement d’elle-même. Les symptômes peuvent inclure des problèmes de peau (éruptions cutanées, démangeaisons…), des manifestations du système digestif (diarrhée, vomissements…) ou des problèmes respiratoires (toux, respiration bruyante). Bien entendu, à cet âge les nourrissons sont vulnérables et le traitement de cette affection est essentiel pour garantir leur bien-être et leur bon développement. Les médecins recommandent généralement l’allaitement maternel accompagné d’un régime d’exclusion du lait de vache pour la mère (les protéines du lait de vache pouvant se retrouver dans le lait maternel), mais l’allaitement n’est pas toujours possible. Dans ce cas, quel produit développer pour les bébés souffrant d’APLV ?

Le contexte spécifique du marché des produits indiqués en cas d’APLV chez le bébé

Pour venir en aide aux mères confrontées à ce type de situation, les entreprises ont développé deux types de formules hypoallergéniques : une formule de première ligne (Extensively Hydrolyzed Formula – EHF) et une formule de seconde ligne (Amino Acid Formula – AAF). En Suisse, ces formules APLV font partie de la « liste des spécialités », ce qui signifie qu’elles peuvent être remboursées par l’assurance maladie lorsqu’elles sont prescrites par des professionnels de  santé.

Un autre aspect spécifique est que le marketing auprès des consommateurs directs n’est pas autorisé.

Dans ce contexte, comment développer un produit idéal et compétitif ?

La composition idéale des préparations pour nourrissons allergiques aux protéines de lait de vache : ce qui compte et les tendances futures

Les préparations pour nourrissons allergiques aux protéines de lait de vache ont évolué depuis leur création en 1865. Aujourd’hui, le monde médical s’accorde à dire que l’allaitement maternel reste la meilleure option, et les préparations hypoallergéniques ne font pas exception. L’examen des dernières innovations dans le domaine des préparations non thérapeutiques montre une claire tendance de la direction que va prendre les formules infantiles. Alors que l’innovation a longtemps été très lente, ces dernières années ont vu une vague d’innovation pointant toutes dans une seule et même direction : la fabrication d’une formule qui se rapproche le plus possible du lait maternel.

Alpha-lactalbumine

En 2019, Arla Foods Ingredients a obtenu l’approbation de la FDA pour fournir son concentré de protéine de lactosérum Lacprodan ALPHA-10, contenant 41% d’alpha-lactalbumine, pour le marché américain des formules. L’alpha-lactalbumine est abondante dans le lait maternel, constituant plus de 25% de la teneur totale en protéines. Arla Foods Ingredients affirme que cet ingrédient aide la formule à reproduire plus fidèlement le lait maternel.

Protéine lactoferrine

Cette année, en 2020, Conagen a annoncé le développement de la protéine lactoferrine, une protéine ayant une forte affinité pour le fer et qui a également des effets antibactériens, antiviraux et immunologiques. En outre, cette protéine est produite par fermentation via des bactéries et ressemble davantage à la lactoferrine présente dans le lait humain, ce qui lui confère des performances supérieures à la lactoferrine contenue dans le lait de vache.

HMO – Human Milk Oligosaccharides

Les HMO sont des molécules de sucre que l’on trouve exclusivement dans le lait humain dans lequel ils sont le troisième élément solide le plus abondant après le lactose et les lipides. Ces HMOs jouent un rôle important pour le bien-être gastro-intestinal des bébés. Ils modulent de manière bénéfique le microbiote du nourrisson. Leur usage permet une stimulation importante du développement des systèmes neurologique, intestinal, et immunitaire.

Il existe 3 principales catégories de HMOs :

  • Les oligosaccharides humain neutres (2′-Fucosyllactose) qui représentent 45% du total
  • Les oligosaccharides humains ‘’N-containing’’ (lacto-N-tetraose) qui repésentent également environ 40%
  • Les acides HMOs (2′-sialyllactose) qui représentent 10 à 15%.

Abott et Nestlé ont mené la charge pour inclure ces OGM (en particulier le lacto-N-néotétraose (LNnT) et le 2′-fucosyllactose (2′-FL)) dans les préparations pour bébés, se rapprochant ainsi un peu plus du lait maternel.

Le format idéal des préparations pour bébés souffrant d’APLV : un produit pratique et savoureux

Il est vrai que rapprocher les formules du lait maternel est très important, mais l’utilisation de formules en poudre pose certains problèmes pour les parents de bébés souffrant d’APLV.

Tout d’abord, ces produits se destinant à un publique infantile, il est important que les bébés les trouvent savoureux. Un mauvais goût est l’un des reproches fréquents fait aux formules thérapeutiques, particulièrement pour les bébés souffrant d’APLV diagnostiqués plus tardivement qui sont susceptibles de refuser de consommer ces produits pourtant vitaux pour leur traitement.

Les formules étant sous forme de poudre, de l’eau doit être ajoutée avant la consommation. Cependant, chaque formule est différente et les formules liquides qui en résultent ont des degrés de viscosité variables. Les bébés sont sujets à des régurgitations et les formules trop liquides peuvent renforcer cette tendance.

Enfin, si l’on regarde du côté du format des formules non-thérapeutiques, on constate sur le marché Français une coexistence entre un format plus grand de 800g et le format de 400g proposé pour les formules thérapeutiques. Dans ce contexte, on peut raisonnablement se demander pourquoi les formats plus grands ne sont pas commercialisés en Suisse ? Un emballage plus grand réduirait en effet la nécessité pour les parents de se rendre fréquemment à la pharmacie, diminuerait l’empreinte écologique des formules APLV et permettrait de réaliser des économies d’échelle.

Les produits APLV : un besoin d’actions marketing tournées vers la prescription

Le marché suisse de l’APLV se caractérise par le fait que la publicité directe aux consommateurs est interdite. Ces formules infantiles font partie de la « liste des spécialités » : leur prix est fixé par les autorités et remboursé si le produit a été prescrit par un professionnel de santé. Cette situation inhabituelle signifie que le marketing direct auprès des consommateurs est impossible et que les véritables cibles marketing sont en fait les professionnels de santé. Bien évidemment, les médecins peuvent choisir de prescrire la formule préférée des parents si ceux-ci expriment une préférence. Mais dans les faits, cette situation est très rare.

Étant donné l’importance des médecins dans le choix de la formule APLV, il est crucial d’assurer que les prescripteurs aient un niveau de connaissance adéquat du produit que l’on souhaite vendre. Se tenir au courant des dernières innovations n’est en effet pas forcément la priorité des pédiatres, considérant le faible volume de prescription qu’un pédiatre effectue par an (moins d’une dizaine dans la plupart des cas). Cela signifie que l’intérêt et les connaissances globales concernant les formules APLV sont relativement faibles chez les professionnels de santé et que leur communiquer ces informations sur les produits APLV représente un véritable enjeu pour les fournisseurs.

Si la publicité directe auprès des parents est impossible, il est toujours possible d’exercer une influence indirecte par l’intermédiaire des pharmaciens, de revendeurs numériques tiers ou d’autres entités. S’assurer que ces tiers soient bien informés et proposent une offre adéquate sur les produits que l’on souhaite mettre en avant permet d’accroître la visibilité du produit.

Ainsi, la formule APLV idéale se rapprochera au maximum du lait maternel, sera adapté au goût des bébés, bénéficiera d’un niveau adéquat de marketing direct auprès des professionnels de santé mais tirera aussi parti des possibilités de marketing indirect auprès des parents. Tous ces éléments sont susceptibles de devenir des facteurs différenciants lors de votre développement produit pour les bébés souffrant d’allergie aux protéines de lait de vache et dans votre stratégie go to market. Ils gagneraient à être pris en compte par les entreprises proposant des formules bébé thérapeutiques en Suisse, mais également dans d’autres pays.


A propos des auteurs
Axel, Consultant et Quentin, Responsable de Mission dans l’équipe Life Sciences d’Alcimed en Suisse

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