Agroalimentaire

2021 : Quelles opportunités de croissance à la table des alcools et spiritueux ?

Publié le 13 janvier 2021 Lecture 25 min

A l’image de nombreux secteurs et particulièrement ceux des biens de consommation, le marché des alcools et spiritueux subit de plein fouet les effets de la COVID-19. Bien que la durée et l’impact précis de la crise restent incertains, il se pourrait que le secteur ait à attendre 2024 pour retrouver des niveaux d’avant-pandémie. En effet, le secteur accuse en 2020 une baisse à deux chiffres de la demande en volumes des boissons alcoolisées, principalement du fait de la forte baisse en CHR et les achats « travel retail » dans les aéroports. Par ailleurs, le secteur connaît de profondes mutations antérieures à la COVID, que cette crise est susceptible d’accélérer. Entre les changements d’attentes, notamment des plus jeunes consommateurs (tournées vers le bien-être, la qualité et la durabilité des produits) et les réflexions autour de nouveaux modèles de distribution, Alcimed vous livre sa vision des principales opportunités de croissance à explorer sur le marché des alcools et spiritueux à l’aune 2021.

L’innovation produit dans les alcools et spiritueux : ébullition autour des contenus et des contenants

Le secteur des alcools et spiritueux est en phase de connaître d’importants changements. D’ici à 2030, 550 millions de personnes auront atteint l’âge légal de consommer de l’alcool. L’arrivée progressive de ces nouveaux consommateurs s’accompagne d’une mutation importante de la consommation des boissons alcoolisées, autour du bien-être, de la qualité et de la durabilité des produits.

Conjuguer la consommation d’alcools et spiritueux avec les besoins bien-être et plaisir des nouveaux consommateurs

Premièrement, pour être en phase avec ces changements, de nouvelles boissons apparaissent avec des arguments portés sur des produits moins caloriques et plus sains, en phase avec des aspirations de bien-être et de plaisir. Les hard seltzers, des eaux gazéifiées, aromatisées et alcoolisées apparues en 2018 aux Etats-Unis rencontrent un succès conséquent. Des marques françaises apparaissent, à l’instar de Natz, développant des produits pour le marché domestique. Si les eaux s’alcoolisent, certains acteurs des vins & spiritueux proposent des produits faiblement alcoolisés voire sans alcool, à l’aide de procédés de désalcoolisation en fin de fabrication. Bacardi Martini a lancé en 2020 Martini Vibrante et Martini Floreale, les premiers spiritueux sans alcool. De quoi faire émerger des catégories à part entières en 2021 ?

Une demande croissante pour des alcools et spiritueux de qualité

Deuxièmement, on observe également une montée en gamme de l’offre, à l’instar de Casino qui a lancé en septembre sa première collection de spiritueux haut de gamme, composée d’un whisky japonais, un London Dry gin et d’une vodka made in France. Cette tendance est portée par des consommateurs plus exigeants envers la qualité des produits, qui adoptent une posture « less but better ». Cette tendance assure un relais de croissance face à une baisse structurelle des volumes sur des marchés traditionnels, comme la bière et les vins tranquilles.

La durabilité des packagings comme nouvel enjeu dans l’innovation produit

Enfin, la durabilité des produits devient aujourd’hui un enjeu stratégique pour de nombreux acteurs. Ainsi, plusieurs innovations iront dans ce sens en 2021. Sur le marché des spiritueux, Diageo lancera au printemps 2021 son célèbre Johnnie Walker dans une bouteille 100% papier, sans plastique et entièrement recyclable tandis que Pernod Ricard teste un concept de bouteille en papier avec ses produits Absolut Vodka et Absolut mixt RTD. Chez les brasseurs, Carlsberg envisage également le lancement d’un produit similaire qui contribuerait à l’objectif de 30% de réduction de l’empreinte carbone du brasseur danois d’ici à 2030. Au-delà des acteurs des alcools et spiritueux, l’essor de ce type d’emballages pourrait constituer un virage à terme pour l’ensemble des industries agroalimentaire.

La crise du COVID : une opportunité d’accélérer l’adoption de modèles alternatifs

Portés par le digital, les modèles direct-to-consumer (D2C) se développent en France et à l’étranger.

La crise du COVID-19 contraint les acteurs des boissons alcoolisées à reconsidérer les modèles de distribution traditionnels, à l’image du canal CHR, durement touché par la crise. Des modèles alternatifs, plus proches des consommateurs émergent pour s’adapter à cette nouvelle réalité. Portés par le digital, les modèles direct-to-consumer (D2C) se développent en France et à l’étranger. A titre d’exemple, autant de marques pure players du web telles que happy-drink, Ubereats ou allo-apéro que de marques traditionnelles comme Toupargel, proposent des services de livraison à domicile en agglomération, de jour comme de nuit. De quoi créer une expérience fluide, complémentaire des canaux traditionnels. L’enjeu n’est pas ici de délaisser les circuits classiques mais bien d’intégrer le online pour faire émerger de nouveaux modèles. Le e-commerce, bien que peu développé face au commerce physique, avec 2,5% des ventes mondiales en valeur, se présente comme un canal à très fort potentiel. Le e-commerce des alcools et spiritueux pourrait connaître une forte croissance sur la période 2019-2024 avec un taux de croissance annuel moyen de 15% contre 1% pour les canaux physiques. Il pourrait ainsi peser 46 milliards de dollars en 2024 contre 21 milliards en 2019.

En 2018, Pernod Ricard est devenu actionnaire « stratégique » de Jumia, la principale plateforme de vente en ligne du continent africain. Cette prise de participation va permettre au groupe d’ajouter un nouveau canal de distribution à son modèle en proposant ses marques aux clients de la plateforme. Pernod Ricard bénéficie également de l’expertise digitale et logistique de Jumia, nécessaire pour maitriser une plateforme dans un modèle intégrant le e-commerce. Cette collaboration pourrait permettre à terme de limiter les intermédiaires et développer une relation plus proche avec ses consommateurs.

L’impact environnemental : une dimension de plus en plus prépondérante dans la stratégie des entreprises de vins et spiritueux

Signe que l’impact environnemental devient un sujet de fond, Pernod Ricard met la durabilité de ses activités au cœur de sa réflexion avec son plan stratégique « Transform and Accelerate », au travers du pilier « responsabilité sociétale ». Le groupe s’est notamment engagé à réduire son empreinte carbone de 50% d’ici 2030.

Ce type d’engagement environnemental dans le secteur des vins et spiritueux prend forme sur l’ensemble de la chaine de valeur. Historiquement, l’amont de la filière viticole est un gros consommateur d’intrants. En effet, la filière consomme 20% des pesticides de l’agriculture française pour 3% des surfaces agricoles. Pour autant, la filière est en phase d’accélérer sa transition écologique. Pour accompagner les acteurs du secteur, différentes normes existent, dont la norme « Haute Valeur Environnementale ». Cette norme gouvernementale est une certification d’exploitation qui garantit l’atteinte de seuils de performance à quatre niveaux : sur le plan de la biodiversité, de l’usage des produits phytosanitaires, de la gestion de la fertilisation et de l’irrigation. Lancé en 2011, le nombre d’exploitations certifiées HVE a augmenté de 50% en 2019, signe de la réflexion menée sur l’impact environnemental de la filière viticole. Au-delà des exploitants indépendants, les groupes ont également un rôle à jouer dans l’accompagnement de cette transition.

En aval, la valorisation des co-produits est également un levier important de progression sur le volet environnemental. A l’heure actuelle, les co-produits de fermentation et de distillation sont généralement séchés et concentrés par évaporation. Les co-produits obtenus sont destinés à l’alimentation animale. L’empreinte carbone de ces procédés n’est pas optimale puisque que les techniques utilisent beaucoup d’énergie sous forme de chaleur et cette empreinte s’alourdit lorsque les co-produits sont exportés.

De nouveaux procédés thermiques, thermochimiques et biochimiques, émergent mais connaissent des contraintes technico-économiques importantes. Certaines innovations s’accompagnent de contraintes techniques rendant leur utilisation inadaptée dans certains cas, ou sont à un niveau de développement trop précoce pour un déploiement industriel à grande échelle sans des investissements conséquents. Par ailleurs, les coûts supplémentaires engendrés pourraient être prohibitifs pour les consommateurs. La prise en compte de l’impact environnemental entraine donc un enjeu de valorisation de la démarche auprès des consommateurs.

Ainsi, le secteur des alcools et spiritueux connait des changements fondamentaux qui représentent des opportunités de croissance à moyen terme. L’innovation produit, notamment pour atteindre les millennials, pourrait entrainer l’émergence de catégories à part entière dans les prochaines années. L’essor du e-commerce et du digital offrent des manières plus directes d’interaction avec les consommateurs, et d’adapter les modèles de distribution à la crise du COVID. Enfin, l’amélioration de l’impact environnemental est un levier de différenciation et de renforcement de l’image de marque. Ces sujets sont les clés de la compétitivité de demain.


A propos de l’auteur
Mathieu
, Responsable de Mission dans l’équipe Agroalimentaire d’Alcimed en France

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