L’équité en santé : une question omniprésente dans le débat public
Les statistiques ont montré une évolution des disparités territoriales des accès aux soins. Opposant initialement les villes et les campagnes, celles-ci touchent désormais les villes moyennes, zones périurbaines et quartiers prioritaires de la ville. Dans ces territoires, l’offre de soins ne permet pas de couvrir les besoins populationnels. L’accès aux soins est rendu difficile à la fois en termes d’accessibilité (temps de trajet pour se rendre chez son médecin et délais d’attente pour obtenir un rendez-vous chez un médecin généraliste ou spécialiste) et d’enjeux socio-économiques (coût d’accès aux soins, en particulier aux soins spécialisés). A titre d’exemple, alors que le délai médian d’obtention d’un rendez-vous chez un ophtalmologue est de 29 jours dans Paris, avec des disparités fortes en fonction des quartiers, il est de 76 jours dans les communes des grands pôles ruraux et de 97 jours dans les communes des petits et moyens pôles.
Selon l’Atlas de la démographie médicale du Conseil national de l’ordre des médecins, le nombre de médecins généralistes en activité régulière a diminué de 11% entre 2010 et 2022. Parallèlement, le vieillissement de la population et l’allongement de l’espérance de vie conduisent à l’augmentation du nombre d’individus atteints de pathologies chroniques, pour lesquels l’accès à des soins de premier recours et coordonnés proches de leur domicile est primordial.
Mettre en place une offre de soins suffisante et équitable sur le territoire : le défi des politiques publiques de santé
Les politiques publiques de santé mises en place depuis les années 1990 visent à développer des logiques de complémentarité et de collaboration entre les établissements médicaux et les professionnels de santé en ville. L’objectif est de faciliter l’installation de ces professionnels de santé dans les zones sous-dotées et de les coordonner pour fluidifier les parcours patients et mieux répondre à la demande de soins.
Un pan important de la politique nationale de lutte contre les inégalités d’accès aux soins passe ainsi par l’amélioration des capacités de formation des jeunes médecins et un renforcement de l’attractivité des professions de santé (via le cumul emploi-retraite par exemple).
Un autre pan de cette politique est le développement des soins de proximité. Ainsi, depuis les années 2000, les mesures se succèdent pour lutter contre les « déserts médicaux ». La loi Hôpital, patients, santé et territoires de 2009 a créé le contrat d’engagement de service public (CESP) pour attirer les étudiants en médecine dans les zones sous-médicalisées. Celle-ci a été renforcée par le Pacte territoire et santé en 2012. En 2015, le nouveau Pacte territoire santé a notamment proposé la création de 1000 maisons de santé d’ici 2017 pour renforcer l’offre de soins de premier recours au plus près des populations.
Depuis 2022, la stratégie nationale « Ma santé 2022 » prévoit de nouvelles mesures pour corriger les inégalités d’accès aux soins, notamment le développement des dispositifs d’exercice coordonné (maisons de santé pluriprofessionnelles, centres de santé, équipes de soins primaires, équipes de soins spécialisées et communautés professionnelles territoriales de santé).
Les CPTS : vers une offre de soins coordonnée à l’échelle d’un écosystème local
Que sont les CPTS, et quel est leur objectif ?
Les CPTS sont créées à l’initiative des professionnels de santé d’un même territoire qui souhaitent s’organiser autour d’un projet de santé qui réponde à des problématiques propres au territoire. Les CPTS remplissent six missions reconnues de service public :
- Faciliter l’accès aux soins.
- Mettre en place des parcours répondant aux besoins des territoires pour renforcer la prise en charge et le suivi des patients, éviter les ruptures de parcours et favoriser le maintien à domicile de patients complexes, de personnes en situation de handicap ou de personnes âgées.
- Initier des actions territoriales de prévention, de dépistage, de promotion de la santé.
- Contribuer au développement de la qualité et de la pertinence des soins pour favoriser l’échange de bonnes pratiques médicales et soignantes.
- Accompagner les professionnels de santé sur leur territoire.
- Participer à la réponse aux crises sanitaires par un plan d’action adapté.
Comment les CPTS sont-elles créées et financées ?
Afin de répondre aux enjeux de la lutte contre les « déserts médicaux », les professionnels de santé qui souhaitent créer une CPTS doivent établir une collaboration étroite et effective afin de comprendre les besoins de la population du territoire. L’objectif est aussi de garantir un financement adéquat pour assurer la pérennité de la CPTS et veiller à ce qu’elle soit bien adaptée aux besoins locaux. Ainsi, le financement de la CPTS dépend du suivi d’indicateurs de moyens et de résultats qui permettent d’accompagner la structure dans l’atteinte des objectifs fixés, notamment en termes d’accessibilité et de qualité des soins.
Parmi les dispositifs d’exercice coordonné, les CPTS, qui sont financées par l’Assurance Maladie, contribuent au développement d’une offre de soins plus coordonnée et au service de la population d’un territoire. En 2023, la cartographie des CPTS en recense 803 sur l’ensemble du territoire à des stades d’avancement différents :
- 183 sont en phase de pré-projet
- 158 construisent leur projet de santé
- 32 sont en négociation de l’accord conventionnel interprofessionnel (ACI)
- 430 ont signé un contrat ACI-CPTS.
Comment les CPTS constituent-elles une réponse à l’enjeu majeur de l’équité en santé ?
Depuis le début de leur déploiement en 2019, les CPTS apparaissent comme des structures innovantes qui regroupent divers professionnels de santé, tels que des médecins, des infirmiers, des pharmaciens et d’autres acteurs médicaux et paramédicaux, qui collaborent de manière plus étroite autour d’un projet commun.
Ainsi, les CPTS contribuent à fournir une offre de soins davantage à la hauteur de la demande et des besoins des populations. Grâce à une coordination renforcée entre les professionnels de santé, une optimisation des ressources médicales locales et une réponse plus efficace aux besoins de santé spécifiques à chaque territoire, les CPTS permettent une meilleure prise en charge globale des patients.
L’augmentation de leur nombre depuis 2019 traduit une volonté forte des professionnels et des autorités de santé de fournir une offre de soins adaptée aux écosystèmes locaux. Si les initiatives ne manquent pas, un accompagnement à la structuration et à la mise en œuvre des CPTS est nécessaire pour permettre aux projets de CPTS d’aboutir et, à terme, pour mailler l’ensemble du territoire national.
La lutte contre les « déserts médicaux » est devenue un élément majeur des politiques de santé mises en œuvre ces dernières années. Avec la hausse des pathologies chroniques et la baisse de l’attractivité de la profession de médecin généraliste, fournir une offre de soins de proximité est un défi des acteurs politiques et des professionnels de santé. Parmi les dispositifs d’exercice coordonné, les CPTS, de plus en plus nombreuses sur le territoire, contribuent à améliorer l’accessibilité aux soins de proximité, à renforcer la qualité des services médicaux et paramédicaux ainsi qu’à garantir une prise en charge plus complète de la population. Les CPTS offrent ainsi une solution prometteuse pour atténuer les disparités territoriales en matière de santé.
Alcimed accompagne les professionnels de santé qui ont un projet d’exercice coordonné en les aidant par exemple à élaborer leur projet de santé, à mobiliser les professionnels de santé sur leur territoire ou encore à construire leur organisation interne. Alcimed peut vous accompagner dans vos projets de santé pour développer l’offre de soins de proximité sur votre territoire. N’hésitez pas à contacter notre équipe !
A propos de l’auteur,
Camille, Consultante au sein de l’équipe Innovation et Politiques Publiques d’Alcimed en France