Santé

2 innovations révolutionnaires en healthtech qui ont soulevé des questions d’éthique et de sécurité à VivaTech 2023

Publié le 19 juillet 2023 Lecture 25 min

Dans un monde en constante évolution, les avancées scientifiques, notamment en healthtech, ouvrent de nouvelles perspectives passionnantes pour améliorer notre quotidien et repousser les limites de notre compréhension de la biologie humaine. Cependant, toute innovation avec un potentiel révolutionnaire est encline à provoquer des débats concernant l’éthique, la sécurité et la responsabilité liées à ces nouvelles technologies.

Lors du plus gros évènement Européen de l’innovation technologique, le salon Viva Technology qui s’est tenu à Paris du 14 au 17 juin 2023, ces questions ont été au centre des débats. En effet, les parties prenantes ont mis en lumière les bénéfices des nouveaux produits de Deep Tech en santé en soulignant néanmoins les implications mentionnées ci-dessus. Dans cet article, Alcimed revient sur deux conférences sur l’innovation médicale qui ont suscité un vif intérêt, abordant respectivement le biohacking et l’édition génétique.

Innovation n°1 : le biohacking

Qu’est-ce que le biohacking ?

Le biohacking, ou « biologie participative », consiste à modifier sa propre biologie à l’aide de technologies biologiques avancées telles que la manipulation de l’ADN, la biologie synthétique et l’ingénierie génétique, dans le but de modifier ou d’améliorer les organismes vivants, y compris les plantes, les animaux et les êtres humains.

L’exemple de l’Américain Josiah Zayner en 2017 reste un moment marquant et emblématique dans l’histoire du biohacking. Lors d’une conférence, Zayner s’était injecté dans l’avant-bras une solution contenant la protéine Cas 9 et un ARN ciblant le gène de la myostatine, protéine inhibant la croissance musculaire afin de supprimer cette protéine et par conséquent augmenter sa masse musculaire.

Le biohacking au salon VivaTech 2023

Lors de la conférence sur le biohacking à VivaTech, les intervenants de cette année ont exploré les différentes facettes de ce domaine qui a le potentiel pour révolutionner notre façon d’interagir avec notre environnement, suivre notre santé en temps réel, ainsi qu’adopter des mesures préventives.

Parmi les intervenants de cette année, le neuroscientifique et CEO de la startup Neurable, Dr. Ramses Alcaide, a présenté sa technologie, qui est un parfait exemple d’application de biohacking. En effet, cette entreprise de pointe dans le secteur de la neurotechnologie a pour objectif de créer des interfaces cerveau-ordinateur (BCI) avancées pour permettre aux individus d’interagir directement avec la technologie en utilisant leurs pensées, mais aussi de récolter des données sur le fonctionnement biologiques des utilisateurs.

L’entreprise développe des casques EEG (électroencéphalographie) de nouvelle génération, capables de détecter et d’interpréter les signaux électriques du cerveau en temps réel. Cette technologie révolutionnaire ouvre des perspectives passionnantes en nous faisant entrevoir un futur dans lequel l’humain devient l’ordinateur. La promesse de Ramses Alcaide, en trois axes, est complexe mais enthousiasmante : permettre à chacun d’effectuer des tâches numériques avec sa propre conscience comme écrire un message ou déplacer des objets dans un jeu, optimiser les technologies avec des IA comme Alexa ou Siri qui comprendrait d’elles-mêmes leurs erreurs, et l’ « affective computing » qui permettrait à l’utilisateur de modifier son environnement par la pensée comme, par exemple, en activant la réduction de bruit du casque lorsque l’utilisateur est concentré.

En repoussant les limites de l’interaction homme-machine, Alcaide se dit ainsi ouvrir la voie à de nouvelles possibilités pour améliorer notre quotidien et notre compréhension du cerveau humain.

Quels sont les enjeux réglementaires autour de l’encadrement du biohacking ?

Ce type de développement technologique soulève des questions éthiques et réglementaires essentielles. L’acte non réglementé de Zayner en 2017 soulevait déjà des inquiétudes quant à la sécurité et à l’efficacité de telles pratiques et cet exemple souligne la nécessité de protéger la santé et la sécurité des individus engagés dans des expérimentations de biohacking.

Les avancées du biohacking posent de multiples enjeux et interrogations. Comment éviter les abus potentiels et prévenir les conséquences néfastes pour la santé ? Comment garantir que les modifications apportées à notre biologie respectent les principes éthiques fondamentaux tels que l’autonomie, le consentement éclairé et la non-malfaisance ?

Il est important de souligner qu’actuellement, il n’existe pas de cadre réglementaire clair pour encadrer les pratiques de biohacking. Dans un secteur en constante évolution, où les innovations se multiplient rapidement, il est primordial de mettre en place des réglementations adéquates afin de garantir la sécurité et la responsabilité des pratiques de biohacking. Cela implique la sensibilisation à l’importance de protéger la dignité humaine malgré les intérêts technologiques et la concurrence économique. Dans ce contexte, il est crucial de promouvoir une collaboration public-privé afin de promouvoir et mettre en place des pratiques sûres et inclusives dans le domaine de l’amélioration humaine.

Innovation n°2 : l’édition génétique

Qu’est-ce que l’édition génétique ?

L’édition génétique est une technique révolutionnaire qui permet de modifier le matériel génétique d’un organisme vivant de manière précise et ciblée, ce qui est notamment investigué pour se focaliser sur les causes profondes de certaines maladies et développer des traitements plus efficaces. Cette approche novatrice repose sur l’utilisation d’outils moléculaires tels que CRISPR-Cas9, qui agissent comme des « ciseaux moléculaires » capables de couper et de modifier l’ADN.

L’édition génétique au salon VivaTech 2023

À VivaTech, les experts ont discuté de l’énorme potentiel de l’édition génétique dans le secteur médical et agricole. Dans le secteur médical, elle permet de concevoir des thérapies personnalisées en modifiant des gènes défectueux, ouvrant de nouvelles perspectives pour le traitement de maladies génétiques graves telles que la drépanocytose. Dans le secteur agricole, l’édition génétique permet d’accélérer la sélection des caractéristiques souhaitées chez les plantes et les animaux, améliorant ainsi la productivité et la résistance aux maladies.


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Quels sont les enjeux réglementaires autour de l’encadrement de l’édition génétique ?

Faire face aux inquiétudes liées à la transmission des cellules germinales à la descendance

L’édition génétique présente des enjeux, défis, et limites significatifs. L’un des principaux dilemmes est la modification des cellules germinales, qui sont transmises à la descendance.

Cette possibilité soulève des interrogations profondes quant aux traits que nous souhaitons concevoir pour les générations futures telles que : Quelles modifications seraient acceptables ? Quelles sont les implications éthiques de la modification des cellules germinales transmises à la descendance ?

Assurer la sécurité et l’efficacité des interventions génétiques

Un autre enjeu clé est lié à la nécessité d’assurer la sécurité et l’efficacité des interventions génétiques. Une illustration de ce débat houleux réside dans la manipulation de l’ADN de deux embryons in vitro en 2018 par le chercheur chinois Jiankui He qui avait modifié leurs génomes à l’aide de la technique CRISPR-CAS9 afin de réduire le risque de contraction du VIH chez les jumelles.

Si les deux bébés sont bien nés sans complication, une étude publiée un an après à néanmoins démontré que cette modification de l’ADN pourrait réduire leur durée de vie, illustrant ainsi la complexité de la génétique et la difficulté de prévision des effets de sa manipulation.

Développer des protocoles rigoureux et des mécanismes de contrôle

Il est essentiel de développer des protocoles rigoureux et des mécanismes de contrôle pour éviter les conséquences néfastes pour la santé des individus concernés et de leur descendance. De plus, l’édition génétique soulève des inquiétudes quant à son utilisation à des fins non thérapeutiques, telles que la modification génétique à des fins d’amélioration humaine. La distinction entre les interventions légitimes et celles qui vont au-delà des limites éthiques reste un défi crucial à aborder.

Mettre en place une approche multidisciplinaire

Il est nécessaire d’adopter une approche multidisciplinaire impliquant des experts en sciences, en éthique, en droit et en sociologie. La participation du public et des universitaires dès les premières étapes de développement est essentielle pour garantir une prise de décision démocratique et informée. Une communication transparente, accessible et pédagogique sur les enjeux de l’édition génétique est également fondamentale pour favoriser une compréhension accrue et une acceptation sociale.

Construire et promouvoir des accords internationaux harmonisés

De plus, des mécanismes de gouvernance internationale doivent être mis en place pour aborder les questions transfrontalières et promouvoir une approche harmonisée de l’édition génétique.

Cela peut inclure des accords internationaux, des comités d’éthique et des réglementations communes pour éviter les divergences éthiques et les courses à l’édition génétique non contrôlées. Certains sommets et congrès rassemblent déjà de nombreux acteurs clés (acteurs de l’industrie, scientifiques de l’université ou de centres de recherche, …) pour discuter de ces problématiques tels que le sommet international sur l’édition du génome humain qui tenait sa troisième édition en mars ou le sommet mondial de la recherche bioéthique qui se tiendra en novembre.

En résumé, l’édition génétique soulève des questions éthiques complexes, nécessitant un dialogue global et inclusif. Les enjeux et limites de cette technologie doivent être pris en compte de manière responsable. En mettant en place un cadre réglementaire adapté, en favorisant la participation publique et en encourageant la transparence, l’édition génétique pourrait être encadrée de manière responsable, sans entraver son potentiel bénéfique pour la santé et le bien-être de l’humanité.

Le salon VivaTech a mis en lumière les possibilités extraordinaires offertes par le biohacking et l’édition génétique pour améliorer notre santé et notre compréhension de notre propre biologie. Cependant, il est essentiel de prendre en compte les questions éthiques, de garantir un accès équitable à ces biotechnologies et d’engager un dialogue ouvert avec le public pour assurer leur adoption responsable.

Il est essentiel de trouver un équilibre entre l’exploration des potentiels bénéfices de ces technologies et la protection des droits, de la dignité humaine et de l’égalité d’accès. Les réglementations appropriées doivent être mises en place pour garantir la sécurité, la responsabilité et l’équité. Les gouvernements, les entreprises, les universitaires et le public doivent travailler ensemble pour établir des cadres éthiques solides, encourager la transparence et favoriser une communication ouverte et inclusive.

De plus, il est primordial d’impliquer le public dès les premières étapes de développement de ces technologies. L’éducation et la sensibilisation jouent un rôle clé dans la promotion d’une compréhension approfondie des enjeux et des possibilités offertes par l’innovation médicale. Alcimed se tient à vos côtés pour vous aider à relever les défis liés aux nouvelles technologies. N’hésitez pas à contacter notre équipe !


A propos de l’auteur, 

Zoé, Consultante au sein de l’équipe Santé d’Alcimed en France

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