Ecologie et exploration spatiale : 3 tendances qui profitent à l’industrie spatiale

Publié le 04 mai 2020 Lecture 25 min

La propulsion électrique dans l’espace et sur Terre fonctionne de manière très différente. Dans l’espace, il n’existe pas de support contre laquelle la propulsion peut s’effectuer. Un satellite ne peut donc se déplacer qu’en expulsant de la matière à l’opposé de sa direction souhaitée. Traditionnellement le procédé s’effectue en brûlant le carburant du satellite, généralement de l’hydrazine. Cette hydrazine pose cependant de sérieux risques sanitaires en cas de fuite du réservoir du satellite, ou des risques environnementaux en cas d’accident. Pour ces raisons, l’UE envisage d’interdire l’hydrazine et ces menaces sont prises très au sérieux. SpaceNews prévoit même une interdiction pour début 2021. Chez Alcimed, nous explorons 3 tendances clés de l’industrie spatiale qui montrent que les considérations environnementales y sont plus que jamais présentes.

1. La propulsion électrique pour les satellites et ses avantages environnementaux et économiques

Au-delà de l’utilisation de l’hydrazine, il existe heureusement un autre moyen de propulser un satellite : la propulsion électrique. La propulsion électrique est non seulement plus sûre pour l’Homme et l’environnement, mais elle est aussi plus efficace. Elle utilise du xénon comme propulseur et la tension électrique pour ioniser les atomes de xénon et les expulser à l’extérieur du satellite. Ce procédé permet aux atomes de xénon d’être expulsés à une vitesse jusqu’à 20 fois supérieure à celle de l’hydrazine. In fine, jusqu’à 10 fois moins de carburant est nécessaire pour obtenir la même puissance développée.

Ces résultats entraînent également de forts bénéfices associés à la réduction de poids, particulièrement lors de la phase de lancement. Ainsi, une charge utile plus importante peut être embarquée sur un seul lanceur, ce qui réduit jusqu’à 50% les émissions polluantes pour les gros satellites géostationnaires. Ainsi, depuis une dizaine d’années, de plus en plus de constructeurs de satellites bénéficient de cette nouvelle technologie, particulièrement dans le cas des missions de télécom GEO (orbite géostationnaire).

2. La propulsion chimique n’a pas dit son dernier mot et tente de devenir plus écologique

Il faut noter que la propulsion électrique a un désavantage majeur, la poussée. Alors que l’hydrazine permet une poussée jusqu’à 400N, la propulsion électrique peut produire seulement quelques mN. Donc pour pouvoir effectuer un large panel de missions satellitaires, l’industrie doit encore trouver un carburant chimique acceptable. Dans cette optique, 3 alternatives plus écologiques à l’hydrazine ont émergé, avec des degrés de maturité différents :

– La plus avancée est un système de propulsion développé par ECAPS et l’agence spatiale suédoise. Ce système a déjà été utilisé pour les missions STPSAT, PRISMA et Skysat.

– Aux USA, l’armée de l’air (US Air Force) a également développé une alternative moins toxique et plus puissante que l’hydrazine. La NASA, Busek, Aerojet Rocketdyne et Ball Aerospace travaillent actuellement ensemble à sa mise en œuvre sous le nom de GPIM (Green Propellant Infusion Mission). Un démonstrateur a été lancé en 2019 pour une mission test de 13 mois.

– L’alternative écologique permettant de développer la plus grande puissance semble être le Green Monergol, en cours de développement en France par le CNES. Bien que ce système soit à un stade de développement moins avancé que ses deux compétiteurs, un prototype de moteur pour ce carburant « vert » a déjà été développé, et sa puissance et efficacité semblent prometteuses.

3. Qu’en est-il des technologies vertes pour les missions d’exploration de l’espace ?

Tout comme les gros satellites GEO, les missions d’exploration de l’espace peuvent voir un intérêt dans la solution électrique. Jusqu’alors, les distances que les vaisseaux devaient traverser ont été en partie limitées par leurs réserves de carburant et les fortes poussées nécessaires à ces missions. Une plus grande efficacité de la solution électrique permettrait donc aux vaisseaux de voyager plus loin, au-delà du système solaire.

Pour le futur, il y existe différents programmes et concepts pour améliorer encore l’efficacité des carburants des vaisseaux et ouvrir leurs horizons. Aujourd’hui, il faudrait 50 000 ans pour atteindre l’étoile la plus proche, avec le carburant et système de propulsion le plus puissant à notre disposition. Les concepts les plus innovants vont jusqu’à utiliser de l’antimatière comme carburant. Mais les idées les plus réalistes, en développement à la NASA, concernent probablement la fusion nucléaire. Depuis 2 ans, le Congrès américain finance ce programme à hauteur de 225 M$. Lors du rassemblement du National Space Council en août dernier, le patron de la NASA, Jim Bridenstine, a présenté ce concept comme le potentiel pas de géant de l’humanité. En théorie, cette technologie pourrait diminuer les temps de voyage vers Mars à seulement 3 ou 4 mois. Cependant, malgré tous les efforts réalisés, les premiers prototypes ne sont pas attendus avant 2024… Donc, la propulsion électrique est toujours la meilleure méthode pour les missions longue distance, pour au moins quelques années encore.

 

Alcimed continuera à suivre ce mouvement vers des technologies à la fois plus respectueuses de l’environnement et plus économiques. Suivant l’évolution de la propulsion électrique et chimique pour proposer une alternative satisfaisante à l’hydrazine, il sera intéressant d’observer le rôle que de potentiels nouveaux concepts pourront jouer dans le futur.

A propos de l’auteur

Steffen, Consultant Senior dans l’équipe Aéronautique Spatial Défense d’Alcimed en France

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